PREYSSAC D'AGONAC
Ce village se trouve à 9km au nord de Périgueux sur les rives de la Beauronne, un petit affluent de l’Isle. La rivière coule alors au niveau + 112m avec des crêtes environnantes à 200m et ce dénivelé est absorbé sur des distances variant de 600 à 1200m. La configuration du terrain est donc favorable à la polyculture et l’élevage doit fournir plus de 70% des ressources, c’est donc une agglomération sans gros moyens potentiels. Cependant la rivière va constituer un cheminement coutumier pour joindre Périgueux en venant de Limoges, celle-ci étant située sur l’ancienne chaussée d’Agrippa, le meilleur itinéraire pour traverser le Massif Central. Ainsi la petite vallée de la Beauronne va s’inscrire à l’aube du Moyen Age sur un chemin de pèlerinage menant vers la Galice et exploitant la voie sur berge mais c’est Agonac, à 5km en amont, qui va tirer le meilleur parti de ces mouvements de foule.
Au XI°s. les églises de Saint Martin d’Agonac et de Preyssac d’Agonac avaient le même plan au sol avec deux cella axées, une grande à l’ouest en guise de nef et une petite à l’est faisant office de sanctuaire et ce sont les aménagements du XII°s. qui vont distinguer les deux édifices. Quelle est celle qui va s’inspirer de l’autre? Preyssac semble la plus ancienne mais ce n’est pas une certitude. Le volume primitif date du début du XI°s. et l’édification de la grande cella suit de peu, soit vers 1140/1160. A cette époque l’ouvrage est essentiellement en structure légère avec murs porteurs et naturellement couverture sur charpente.
Les premiers aménagements porteront sur la petite cella et les travaux commencent vers 1100/1110 avec le plaquage en interne de doubles arcatures destinées à porter un berceau plein cintre mais sur cette partie de l’ouvrage les reprises seront nombreuses et l’enclenchement des différentes campagnes demeure incertain. Cette première voûte s’appuie à l’orient sur le mur pignon du XI°s. par contre, à l’occident, les réactions perpendiculaires seront absorbées par un arc puissant établi en sous œuvre dans le plan de jonction des deux cella.
A la fin de ces travaux, nous sommes alors vers 1110/1115, le voutement de la nef est envisagé mais la portée est plus grande et les vieux murs ne supporteront pas un berceau plein cintre. Alors le constructeur choisit de décomposer le volume en deux travées en flanquant les élévations latérales de berceaux perpendiculaires, la portée est maintenant réduite et compatible avec les voûtes en berceau de l’époque mais ce système, sans doute importé du Limousin, engendre des réactions longitudinales. Il faut reprendre en puissance. A l’occident, côté façade, les effets sont confiés à de puissantes piles carrées et, à l’orient, des ouvrages semblables sont plaqués sur l’arc de reprise en sous œuvre récemment édifié. Les piles médianes sont percées d’une ouverture longitudinale facilitant la circulation. Cet ensemble s’intègre bien dans les murs du XI°s. avec simplement un accrochage sur le parement interne.
Aujourd’hui, curieusement, ces arcs porteurs sont de profil brisé tandis que le grand berceau coiffant la nef est en plein cintre. Cet anachronisme s’explique. Il s’agit d’une reprise ultérieure destinée à réduire les poussées longitudinales et les dessins obtenus sont légèrement différents. Ces travaux furent réalisés fin XIII°s. pour parer à des mouvements longitudinaux qui faisaient souffrir la vieille façade. Mais, peine perdue, il faudra dans les siècles suivants la conforter avec deux énormes massifs de sauvegarde. Résumons les dates probables: reprise de la structure en sous œuvre entre les deux cella 1115/1120, établissement des piles et des arcs de 1120 à 1130 et enfin la grande voûte en berceau plein cintre vers 1130/1135.
Dès ces travaux achevés, les paroissiens demandent l’édification d’un clocher pour s’aligner sur les paroisses environnantes mais les bases de l’ouvrage ne s’y prêtent guère. Cet ouvrage sera édifié à l’occident avec reprise sur la façade du XI°s. (travaux visibles) et sur les murs latéraux datant de la même époque mais qui sont, eux, confortés par les structures internes. Par contre, sur le revers, il faut prendre appui sur le sommet des arcs latéraux et enjamber le grand berceau. L’ouvrage sera donc fortement rectangulaire et de structure légère. Les fenêtres furent, semble-t-il, remodelées.
L’ultime campagne date du XV°s. et porte sur une chapelle latérale établie face à l’arc oriental sud qui sera , à cette occasion, percé d’une ouverture. Enfin, lors des troubles de la fin du Moyen Age, les parties hautes seront transformées en refuge et recouvertes d’un comble unique avec surélévation des murs. Ces travaux vont menacer dangereusement la petite cella orientale dont il faudra conforter l’angle sud avec un puissant contrefort. A cela s’ajoute une reprise en parements des vieilles maçonneries du mur pignon.
Cette église romane, intéressante à plus d’un titre, est aujourd’hui en bien mauvais état. Une municipalité indécente l’a encombrée de matériel scolaire pour y interdire toute célébration.
Agonac - Eglise St. Martin Vue d'ensemble
(A) Cella orientale début du XI°s.
(B) Cella occidentale milieu XI°s,
(C) Aménagement du clocher 1140/1150
(D) Cella orientale aménagement 1100/1110
(E) Berceau oriental vers 1115
(F) Reprise des arcs de liaison 1115/1120
(G) Aménagement de la grande cella 1115/1130
(H) Grand berceau vers 1135
(J) Clocher 1145/1150
(K) Aménagement en refuge fin XIV°s.
(L) Chapelle latérale début XV°s.
(M) Contrefort sud début XIII°s.
(N) Contreforts de sauvegarde XIV°/XV°s.
Preyssac d'Agonac. Vue d'ensemble
Preyssac d'Agonac. Le porche
Preyssac d'Agonac. Le porche
Preyssac d'Agonac. Le chevet